Mieux comprendre le burn-out en entreprise

Le burn-out, ou syndrome d’épuisement professionnel, toucherait 34 % des salariés français*, de toutes professions, tous âges et tous genres. Tabou il y a encore quelques années, il suscite désormais une attention croissante. Comprendre ce syndrome, ses répercussions sur la santé et ses conséquences socio-économiques est devenu un véritable enjeu.

Dans ce cadre, il est essentiel pour les employeurs, les salariés ainsi que les services de prévention et de santé au travail de collaborer étroitement sur cette question du mal-être professionnel.

Découvrez dans cet article ce qu’est le burn-out, ses facteurs de risques, les méthodes de dépistage ainsi que des mesures préventives à mettre en place au niveau individuel et collectif au sein des entreprises.

Le burn-out en entreprise

A propos du burn-out

Définition

Le burn-out est considéré comme un épuisement physique et psychique résultant des conditions de travail. La terminologie est apparue dans les années 1960 aux Etats-Unis, mais elle est formalisée pour la première fois en 1974.

L’OMS définit le burn-out comme « un syndrome résultant d’un stress chronique au travail qui n’a pas été géré avec succès. Il est caractérisé par trois dimensions : un sentiment de manque d'énergie ou d'épuisement ; une distance mentale accrue par rapport au travail, un sentiment de négativisme ou de cynisme ; une efficacité professionnelle réduite ». Le terme de burn-out désigne ainsi spécifiquement des phénomènes relatifs au contexte professionnel. Il ne doit pas être utilisé pour décrire des expériences dans d’autres domaines de la vie.

Contrairement aux informations diffusées dans certains médias, le burn-out est un syndrome d’épuisement professionnel non classé, à ce jour, au registre des maladies dans la classification internationale des maladies (CIM). Il y est décrit dans le chapitre « Facteurs influants sur l’état de santé ou sur les motifs de recours aux services de santé ».

Si le terme de burn-out fait aujourd’hui partie du vocabulaire courant, il renvoie à une symptomatologie dont les limites sont encore mal circonscrites. On dénombre au travers des publications scientifiques plus de 130 manifestations somatiques différentes et une cinquantaine de définitions… ce qui en fait un spectre très large pouvant couvrir une multitude de pathologies ou de troubles cliniques. Il se confronte par conséquent à divers diagnostics et son constat s’avère factuellement complexe.
Les différents points de vue et approches peuvent entraîner une confusion dans la conceptualisation, l'analyse et le repérage du burn-out. Néanmoins, son évaluation révèle à chaque fois :

  • Un état d’épuisement, non contextuel et inscrit dans la temporalité (épuisement physique et psychique).
  • Une diversité de manifestations somatiques.

Qui est concerné ?

Le 9ème baromètre du cabinet Empreinte Humaine et Opinion Way, d’après une étude réalisée en 2022 sur plus de 2000 salariés, révèle que 41 % des salariés seraient en détresse psychologique, avec parmi eux plus de 2,5 millions de personnes en burn-out qualifié de « sévère ». Des chiffres élevés et inquiétants.
Les diverses enquêtes menées en la matière soulignent que ce syndrome d’épuisement affecte surtout les femmes, les jeunes de moins de 29 ans, les télétravailleurs, les managers ainsi que les catégories socioprofessionnelles qui exigent un investissement personnel et affectif important.

Le mal-être au travail est une réalité avec des conséquences sanitaires avérées. Il ne s’agit plus seulement d’une sensation de fatigue ou de sur-stress, d’un sentiment d’abandon ou de subordination. Les conséquences dépassent l’espace de travail et elles s’immiscent dans la sphère privée du salarié. 

Les facteurs de risques du burn-out 

La recrudescence du nombre de cas de burn-out peut être attribuable à des facteurs sociologiques et technologiques.
D'un côté, notre évolution sociologique, souvent centrée sur le productivisme, a engendré des environnements de travail exigeants dans lesquels efficacité et performance sont les maîtres-mots. De l’autre, les évolutions technologiques ont conduit à une accélération rapide des pratiques dans un monde 4.0 où les smartphones sont de véritables ordinateurs portables accessibles en permanence. Cette hyperconnectivité a fait évoluer les modes d'organisation du travail et a rendu floue la limite entre l’activité professionnelle et la vie personnelle. On parle alors de « blurring » pour désigner ce phénomène qui augmente la charge mentale et émotionnelle des individus.

Si l'évolution technologique a apporté des avantages en termes de productivité, elle a également contribué à une augmentation des exigences et des pressions excessives sur les individus, pouvant conduire au burn-out dans un environnement professionnel de plus en plus exigeant. Le burn-out est ici considéré comme une rupture psychique causée par une surcharge de tâches incapables d'être gérées sans épuiser les réserves souvent invisibles des salariés. 

Au sein de l’environnement de travail, voici les principaux facteurs de risque associés au syndrome d'épuisement professionnel :

  1. Charge de travail excessive : un niveau élevé de responsabilités ou des demandes professionnelles démesurées peuvent accroître le risque de burn-out.
  2. Manque de contrôle : le manque d'autonomie dans le travail ou le sentiment de ne pas avoir de prise sur ses décisions peut contribuer au stress et au mal-être.
  3. Absence de soutien social : un manque de soutien de la part des collègues ou des supérieurs hiérarchiques peut aggraver le sentiment d'isolement.
  4. Déséquilibre entre vie professionnelle et personnelle : l'incapacité à concilier efficacement travail et vie privée peut augmenter le risque d'épuisement professionnel.
  5. Manque de reconnaissance : le manque de reconnaissance pour les efforts déployés au travail peut affecter négativement la motivation et le bien-être.
  6. Environnement de travail toxique : un climat de travail néfaste, caractérisé par des conflits, du harcèlement ou une culture de la surcharge de travail, peut favoriser le burn-out.
  7. Faible soutien organisationnel : un manque de ressources, de politiques ou de mesures de soutien au sein de l'entreprise peut accroître le stress et la détresse psychologique.
  8. Manque de clarté des rôles : une ambiguïté dans les attentes professionnelles peut générer de l'anxiété et de la confusion chez les salariés.
  9. Manque de développement professionnel : l'absence d'opportunités d'apprentissage et d'évolutions de carrière peut entraîner un sentiment de stagnation et de démotivation.
  10. Contraintes temporelles : des délais irréalistes ou un rythme de travail intense peuvent aggraver la pression et la tension émotionnelle.

Il est important de noter que le burn-out est généralement le résultat d'une combinaison de plusieurs facteurs. Chaque personne peut réagir différemment en fonction du contexte, de sa personnalité et de sa propre culture. La prise de conscience de ces différents facteurs est essentielle pour prévenir et gérer le burn-out au sein de l'environnement professionnel.

Les méthodes de dépistage du burn-out 

Les méthodes de dépistage du burn-out sont basées sur des évaluations scientifiques et psychométriques visant à identifier les symptômes caractéristiques de ce syndrome d'épuisement professionnel. 

On peut citer quelques-unes des méthodes de dépistage couramment utilisées :

  1. Les questionnaires d'évaluation : des questionnaires standardisés et validés sont utilisés pour évaluer les symptômes du burn-out chez les individus. Le Maslach Burnout Inventory (MBI) est l'un des questionnaires les plus utilisés pour mesurer l'épuisement émotionnel, la dépersonnalisation et la diminution de l'accomplissement personnel.
  2. Les entretiens cliniques : des entretiens menés par des professionnels de la santé mentale ou des spécialistes de la santé au travail permettent d'approfondir l'expérience des individus et de détecter les prémices de burn-out.
  3. Les échelles d'évaluation : des échelles spécifiques sont développées pour mesurer la sévérité des symptômes du burn-out et évaluer leur évolution au fil du temps comme le MBI ou le Copenaghen Burn-out Inventory (CBI).
  4. Les évaluations physiologiques : certaines études explorent les corrélations entre le burn-out et des paramètres physiologiques tels que les niveaux de cortisol (hormone du stress) ou d'autres marqueurs biologiques.
  5. Les tests psychométriques : la psychométrie est une science qui étudie et mesure les caractéristiques psychologiques des individus. À l'aide d'instruments de mesures standardisés, elle propose d'analyser la construction psychologique d'une personne et de révéler ses caractéristiques par comparaison avec un groupe de personnes représentatif. Les évaluations psychométriques sont, par exemple, des évaluations de la personnalité, de l'intelligence émotionnelle et des préférences comportementales.
  6. Ces tests sont utilisés pour évaluer les facteurs de risque potentiels, les ressources personnelles et les mécanismes d'adaptation face au stress.
  7. L’évaluation par des IA augmentées qui mettent en relation des experts de l’IA et des professionnels de santé apparaissent prometteuses. Ces méthodes d’aide diagnostic repose sur le Natural Language Processing. Concrètement, des algorithmes analysent automatiquement les évaluations classiques et identifient si le langage relève du burn-out ou pas. Les données sont encore peu nombreuses mais ouvrent la voie à une forme de dépistage et de prise en charge intéressante dans le futur**. 

Le dépistage du burn-out doit être effectué par des professionnels qualifiés et le diagnostic doit être posé de manière approfondie, en tenant compte de tous les aspects du bien-être mental et professionnel de l'individu concerné.

Repérer les situations d’épuisement professionnel

Au niveau individuel, il est essentiel que l'employeur, l'encadrement, les acteurs de la prévention au sein de l'entreprise ainsi que le service de prévention et de santé au travail restent attentifs à certains signaux qui indiquent qu'un salarié est en situation de burn-out :

  • Manque d'énergie et d'enthousiasme pour accomplir le travail.
  • Problèmes de concentration et de disponibilité mentale au travail.
  • Irritabilité accrue ou réactions émotionnelles inhabituelles.
  • Dévalorisation du travail accompli, de ses propres compétences et efficacité.
  • Désinvestissement professionnel et perte d'intérêt pour les tâches.

Tout changement d'attitude, de comportement ou de performance qui se traduit par un repli sur soi ou un désengagement inhabituel devrait attirer l'attention du cercle professionnel.

Au niveau collectif, il est important d'examiner les indicateurs de dépistage des risques psychosociaux, tels que les enquêtes de satisfaction au travail, les taux d'absentéisme, les taux de rotation du personnel, les retours d'expérience lors des entretiens individuels, etc. Ces indicateurs peuvent aider à identifier des tendances et des problèmes émergents concernant le bien-être des salariés au sein de l'entreprise.

L’analyse des organisations de travail est une mesure prépondérante dans la prévention de la survenue du burn-out. Elle mobilise le top management, les services ressources humaines et les organisations professionnelles. C’est un levier dynamique, collaboratif et pérenne qui contribue au maintien des salaries dans de bonnes conditions de travail et renforce la productivité des entreprises. Il ne s’agit pas là de tout réinventer, mais de prendre le temps d’analyser des dysfonctionnements structurels. Cela peut également être l’occasion de renforcer les succès.

En surveillant attentivement ces signaux et en analysant les indicateurs collectifs, l'entreprise peut mieux anticiper et prévenir le burn-out, ce qui permettra de prendre rapidement des mesures appropriées pour soutenir et accompagner les salariés en difficulté. La prévention précoce est cruciale pour promouvoir un environnement de travail sain et soutenant.

Les mesures préventives

Selon la citation de Benjamin Franklin : "une once de prévention vaut un livre de guérison". Elle souligne l'importance de privilégier la prévention pour éviter les problèmes de santé et de mal-être.  
Les mesures préventives visant à prévenir le burn-out peuvent être mises en place à la fois au niveau individuel et collectif au sein des entreprises. 

Au niveau individuel

  • Sensibilisation et formation : sensibiliser les salariés aux signes du burn-out et leur fournir des formations sur la gestion du stress, la résilience et les techniques d'auto-évaluation.
  • Encourager l'équilibre vie professionnelle et personnelle : promouvoir des politiques flexibles en matière de travail, telles que le télétravail ou des horaires de travail flexibles, pour permettre aux salariés de mieux gérer leurs engagements personnels.
  • Autonomie et contrôle : donner aux salariés une plus grande autonomie dans l'organisation de leur travail et leur permettre de participer aux prises de décision concernant leur domaine d'activité.
  • Reconnaissance et récompenses : reconnaître le travail accompli et récompenser les salariés pour leurs contributions afin de renforcer leur motivation et leur engagement.
  • Accès à des ressources de soutien : mettre à disposition des ressources d'aide psychologique ou de coaching pour les salariés qui pourraient avoir besoin d'un soutien supplémentaire.

Au niveau collectif (au sein de l'entreprise)

  • Culture d'entreprise valorisante : favoriser une culture d'entreprise qui mise sur le bien-être des salariés et qui encourage ouvertement la communication sur les problèmes liés au stress et au burn-out.
  • Gestion du travail et des ressources : réévaluer la charge de travail et allouer les ressources de manière équilibrée pour éviter les surcharges et les déséquilibres.
  • Formation des managers : former les managers, principalement le top management, à la reconnaissance des signes du burn-out, à la communication bienveillante et à la gestion de la charge de travail de leurs équipes.
  • Programme de soutien : mettre en place des programmes de soutien et des initiatives de bien-être pour les salariés, tels que des activités connexes pour renforcer la cohésion des équipes. 
  • Évaluation régulière : effectuer régulièrement des évaluations du climat de travail et du bien-être des salariés pour détecter les éventuels problèmes et mettre en œuvre des actions correctives.

 

En tant que service de prévention et de santé au travail, Thalie Santé est en mesure d’accompagner les entreprises dans la définition et la mise en œuvre de mesures préventives qui favoriseront un environnement de travail sain.
Elles contribueront ainsi à réduire le risque de burn-out chez les salariés et à favoriser leur bien-être général.
Vous êtes adhérent à Thalie Santé ? Parlez-en à votre médecin du travail ou infirmier en santé au travail !

 


* Chiffres issus du 9ème baromètre du cabinet Empreinte Humaine et Opinion Way, d’après une étude réalisée en 2022 sur plus de 2000 salariés.

** Merhbene, G., Nath, S., Puttick, A. R., & Kurpicz-Briki, M. (2022). Burnout Ensemble: Augmented Intelligence to Detect Indications for Burnout in Clinical Psychology. Frontiers in big data, 5, 863100. https://doi.org/10.3389/fdata.2022.863100